décembre 2018

L’ÉDITO.

Décembre annonce inlassablement la fin d’une année et l’arrivée d’une nouvelle… Malgré la tendance planétaire à véhiculer une image festive et joyeuse de cette période spéciale, c’est un secret pour personne qu’elle peut également donner le cafard à certains. Tout le monde n’est pas submergé par la traditionnelle vague d’amour des fêtes de fin d’année. Il arrive même que les cadeaux, les grands repas interminables, les réunions familiales et les cotillons de la Saint-Sylvestre soient des bêtes noires et en dépriment plus d’un. On les appelle “natalophobes”, c’est-à-dire angoissés de Noël, ou anti-Nouvel An. Comment et pourquoi cette période peut-elle autant saper le moral ? Certains psychologues se sont penchés sur le sujet et nous livrent quelques pistes de réflexion.
« Cette période est souvent fantasmée. On imagine uniquement le grandiose et le féerique. La réalité vient forcément décevoir cette vision, car rien n’est jamais parfait », explique Samuel Dock, psychologue clinicien et auteur. Le fantasme découle de ce que les médias véhiculent. « Il est normal que nos fêtes de fin d’année ne ressemblent pas aux publicités ou aux films, ce sont des mises en scène et cette perfection est inatteignable », confirme d’emblée Boris Charpentier, psychologue et coach. Sans compter que cette attente n’est pas réellement récompensée en pratique : « les fêtes durent très peu de temps et passent très vite. On perd rapidement l’objet du fantasme et une frustration peut alors naître », signale Samuel Dock. Même déçus par la vitesse à laquelle s’égrène le mois de décembre, un seul mot d’ordre règne : le bonheur. Baigner dans la lumière incandescente de l’amour, déborder de projets d’avenir, rire à tue-tête et être un bon vivant : telle est la liste du parfait comportement à adopter. « Effectivement, une certaine surenchère entraîne une compétition dans la fête. On attend de nous de terminer l’année en apothéose. C’est une contrainte et une vraie norme sociale », déplore Samuel Dock. Force est de constater que cela est vrai. Soyez un peu d’humeur maussade au réveillon et vous verrez si l’un de vos parents ne vous le fait pas remarquer… La cause de ce vague à l’âme peut être aussi due à l’enfance. La magie des fêtes a-t-elle jamais mieux fonctionné que sur les enfants ? Lorsque l’on grandit, cette féerie disparaît évidemment. « On ne la retrouve jamais au cours de sa vie. Une fois adulte, on connaît le prix de tout cela et rien n’est magique finalement. Pour que ce moment soit remarquable, il faut l’organiser et le rendre soi-même remarquable. Certaines personnes ont du mal à faire le deuil de cette désillusion », atteste Samuel Dock. Dès la prime enfance, la fin de l’année a une saveur particulière que l’on ne veut surtout pas perdre. Selon Boris Charpentier, il ne faut pas dresser de parallèle entre les contes enfantins et la réalité, sinon la déception est assurée.
Comment faire alors pour surpasser cette période pour ceux qui ne se réjouissent pas forcément ? D’abord, il est essentiel de déculpabiliser. « Ce n’est pas grave de ne pas avoir envie de fêter l’année qui s’achève. Il n’y a pas de honte à ressentir des émotions négatives. Je pense que c’est inéluctable et que tout le monde ressentira cela dans sa vie », soutient Samuel Dock. Donc, si l’envie manque d’arpenter les rues à la recherche du cadeau idéal et qu’une soirée passée à la maison devant un film nous fait de l’œil, « on s’écoute. Rien ne sert de se forcer, il est inutile de jouer les surhommes heureux, il faut avant tout faire valoir son désir », encourage le professionnel. Autre hypothèse : « Se réapproprier l’événement est une bonne chose. Ne pas hésiter à bouleverser les habitudes, comme partir en vacances, par exemple », suggère Boris Charpentier. Ce dernier souligne que ce phénomène est courant et non isolé : « beaucoup plus de personnes qu’on ne le croit souffrent en période de fêtes. Il ne faut pas craindre d’en parler par peur d’être incompris ». Bilan, on oublie les téléfilms aux sapins de trois mètres de haut somptueusement décorés, les rencontres romantiques sous la neige, et les câlins familiaux en pulls à tête de cerf. Et on part vers des nouvelles aventures, en Thaïlande par exemple. Ou pas.

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